Lutte anti-terroriste: la sécurité préventive porte ses fruits

Les trois attentats suicide qui ont frappé le Liban en moins d'une semaine illustrent une décision centralisée visant à lancer une nouvelle campagne de terreur, après un répit de trois mois. Cet apaisement était dû, en premier lieu, aux succès de la Résistance et de l'armée syrienne, qui ont détruit les repaires des groupes extrémistes dans le Qalamoun, et, en second lieu, à l'amélioration du climat politique après la formation du gouvernement de partenariat national.
Si les kamikazes avaient pu atteindre leurs objectifs, ces trois attaques auraient pu faire des centaines de morts et de blessés, parmi les civils. Des sources de sécurité révèlent, en effet, que le but des terroristes et de leurs commanditaires était de faire le plus grand nombre de victimes, afin de créer un climat de peur et de panique dans le pays, de paralyser les services de sécurité et d'exacerber les tensions communautaires. Le choix des cibles confirment ces informations: des restaurants pleins à craquer à l'heure où les gens regardent les matches du Mondial. Le terroriste de Tayyouné projetait, vraisemblablement, de faire exploser sa voiture piégée au milieu des clients du restaurant populaire «Assaf», où quelque 300 personnes regardaient le match Brésil-Cameroun, lundi 23 juin. Il aurait réussi s'il n'avait pas été intercepté par l'agent de la Sûreté générale (SG), le martyr Abdel Karim Hodroj. Les deux terroristes saoudiens de l'hôtel Du Roy, à Raouché, Ali ben Ibrahim Al-Thoueini, tué dans l'explosion, et Abdel Rahman Ben Nasser al-Chouneifi, actuellement interrogé par la SG, projetaient d'attaquer le célèbre hôtel et restaurant al-Saha, sur la route de l'aéroport. L'attentat était programmé pour mercredi soir.
Les groupes terroristes planifiaient également de lancer des attaques pendant les repas de rupture du jeûne, au cours du mois du Ramadan.
Etat d'alerte permanent
Les terroristes n'ont heureusement pas réussi à atteindre leur objectif grâce à la vigilance des services de sécurité, qui appliquent la stratégie de la sécurité préventive. Celle-ci se base sur la collecte d'informations à travers les réseaux d'informateurs, l'analyse approfondie des données obtenues, la surveillance rapprochée des éléments suspects, et le renforcement de la coopération et de l'échange de renseignements avec des services amis ou étrangers. Cela nécessite un état d'alerte permanent et la mobilisation de commandos d'élite, prêts à être rapidement déployés sur le terrain, comme cela s'est produit lors de la perquisition de l'Hôtel Du Roy.
La mise en place d'un mécanisme de coopération entre les différents services de sécurité libanais a également joué un rôle dans les succès enregistrés ces derniers temps dans la lutte anti-terroriste. La Sûreté générale est à l'avant-garde dans cette bataille. Sous la houlette de son directeur, le général Abbas Ibrahim, ce département a mis tous ses moyens au service de la lutte contre les groupes terroristes. Il a réactivé et renforcé ses réseaux d'informateurs dans tout le pays, a intensifié la formation et le perfectionnement de ses unités d'élites, et a établi des relations saines et professionnelles avec les services de renseignements étrangers, aussi bien syriens qu'occidentaux.
Cela lui a permis d'être bien informé. Le repérage des terroristes du Du Roy a été possible grâce à une analyse rapide et efficace de l'information. Les deux Saoudiens avaient, en effet, effectué des réservations dans trois hôtels différents de Beyrouth, alors qu'ils logeaient au Du Roy. Cela a mis la puce à l'oreille de la SG, qui avait, en parallèle, reçu des informations de la part des services de renseignements allemands sur l'imminence d'une attaque terroriste au Liban. L'Allemagne se trouve en premières lignes car ses services sont très actifs en Turquie, utilisée comme pays de transit par les terroristes envoyés par Daech, non seulement au Liban mais aussi dans de nombreux pays européens. Effectivement, al-Thoueini et al-Chouneifi sont venus à Beyrouth de Raqa, en Syrie, via Istanbul.
Selon des sources bien informées, les deux kamikazes saoudiens ont reçu l'ordre de se rendre au Liban de la part d'un émir de Daech à Raqa, un Jordanien dont le frère, Abdel Malek Mohammad Youssef Osman Abdel Salam, purge une peine de prison à Roumié pour activités terroristes.
L'interrogatoire du rescapé de l'explosion du Du Roy a permis d'identifier leur complice libanais, Mounzer Khaldoun al-Hassan, originaire de Bazbina, dans le Akkar, et porteur de la nationalité suédoise. Ce suspect a perdu deux frères, qui ont mené des attentats suicide contre l'armée syrienne près du Krak des Chevaliers, non loin de la frontière libanaise. Ils étaient membres du groupe extrémiste libanais Jund el-Cham. Un troisième frère est actuellement en détention dans un pays européen pour avoir tenté de faire exploser des trains. Il aurait également deux autres frères emprisonnés à Roumié, et l'un de ses cousins aurait été tué lors d'une attaque suicide contre les forces de l'ordre libanaises, le 20 mai 2007, à la veille de la bataille entre l'Armée et le groupe extrémiste Fatah al-Islam.
Selon la chaine de télévision LBC, Mounzer al-Hassan aurait été vu quittant le camp de Baddaoui, près de Tripoli, pour le jurd du Akkar.
Lutte pour la suprématie
Cette nouvelle campagne de terreur est certainement liée à l'offensive de Daech en Irak. L'organisation ultra-extrémiste mène aussi un combat sans merci contre les autres mouvances terroristes, pour la suprématie sur la «scène du jihad mondial». Son leader, Abou Bakr al-Baghdadi, veut être reconnu comme le chef suprême, une sorte de nouveau Oussama Ben Laden, et exige que tous les autres émirs lui prêtent allégeance. Ceux qui refusent sont combattus et assassinés, les membres mâles de leurs familles massacrés et les femmes réduites en esclavage (sabaya). En attaquant le Liban, Daech veut atteindre trois objectifs: affirmer sa suprématie face à tous les autres groupes terroristes, en montrant qu'il a la main longue; exacerber les tensions communautaires à l'échelle de tout le Levant; gêner le Hezbollah, qui combat les groupes extrémistes en Syrie.
Pour lutter efficacement contre cette organisation, les services de sécurité libanais ont besoin d'une couverture complète, assurée par le gouvernement et par la classe politique. Aujourd'hui, cette couverture existe, ce qui n'était pas le cas il y a quelques mois ou au début de la crise syrienne, lorsque la Sûreté générale avait été contrainte de remettre en liberté l'un des plus dangereux terroriste, Chadi al-Mawlaoui, à cause des pressions politiques. Toutefois, cette couverture politique est battue en brèche par certains milieux du 14-Mars. Les Forces libanaises et plusieurs cadres du Courant du futur sont tentés de justifier les attaques terroristes, pour de mesquines considérations internes. Cependant, les principaux chefs du Courant du futur (Saad Hariri, Nouhad al-Machnouk...), continuent de couvrir politiquement les services de sécurité et le gouvernement, où siège leur parti. Mais certaines sources craignent que cette couverture ne soit plus assez solide, si les extrémistes du 14-mars continuent de jouer à la cinquième colonne.
Source : French.alahednews
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