Le Pakistan dit anticiper une frappe militaire indienne imminente

Par AlAhed avec AFP
Le Pakistan a dit mercredi anticiper une frappe militaire indienne sous moins de deux jours, après le feu vert donné par le premier ministre indien Narendra Modi à des représailles à l’attaque au Cachemire.
«Le Pakistan ne frappera pas le premier mais n’hésitera pas à répliquer avec force», a martelé le ministre pakistanais des Affaires étrangères Ishaq Dar, après que le premier ministre indien Narendra Modi a, selon son entourage, donné mardi carte blanche à son armée pour organiser la «riposte».
Malgré les appels internationaux à la désescalade, la tension franchit chaque jour un nouveau palier entre ces deux puissances nucléaires, plus d’une semaine après la mort de 26 civils dans l’attaque à Pahalgam, au Cachemire sous contrôle indien.
New Delhi a aussitôt accusé Islamabad de cet attentat jamais revendiqué.
Le Pakistan, quant à lui, réclame une «enquête neutre» et renvoie l’accusation de «soutien au terrorisme transfrontalier» à son voisin et rival historique.
Deux jours après cette attaque, et après des séries de sanctions diplomatiques, des accords rompus et des visas annulés, les deux pays ont commencé à échanger des tirs.
Pour la sixième nuit consécutive, leurs soldats, parfois à quelques dizaines de mètres de distance sur la Ligne de contrôle (LoC), la frontière de facto au Cachemire, ont tiré.
La veille pourtant, ont indiqué l’armée pakistanaise et une source militaire indienne, les deux armées avaient eu leur échange téléphonique hebdomadaire de «routine», dont le contenu est habituellement tenu secret.
Elles ont discuté de ces «violations du cessez-le-feu» sur la LoC, ont ajouté les deux camps qui s’accusent mutuellement d’avoir ouvert le feu le premier.
Islamabad a également annoncé avoir abattu deux petits drones de surveillance indiens entrés dans son espace aérien au Cachemire en l’espace de 24 heures.
«Toute agression entraînera une riposte décisive»
Si ces escarmouches n’ont fait ni victimes ni dégâts d’importance, «le Pakistan dispose de renseignements crédibles selon lesquels l’Inde a l’intention de lancer une frappe militaire dans les prochaines 24 à 36 heures, en utilisant l’incident de Pahalgam comme prétexte», a annoncé dans la nuit de mardi à mercredi le ministre pakistanais de l’Information, Attaullah Tarar.
«Toute agression entraînera une riposte décisive. L’Inde sera pleinement responsable de toute conséquence grave dans la région», a-t-il prévenu, alors que les deux pays comptent, ensemble, un habitant sur cinq de la planète.
Selon l’entourage de Nerandra Modi, le chef du gouvernement ultranationaliste hindou à New Delhi a donné mardi carte blanche à l’armée pour organiser la «riposte indienne à l’attaque».
Il a dit à ses chefs d’état-major qu’ils «avaient la liberté de décider des cibles, du moment et du mode de la riposte», selon une source gouvernementale.
Au Cachemire pakistanais, en prévision du pire, le million et demi d’habitants des villages proches de la LoC dégagent de la place dans leurs bunkers de fortune.
À Karachi, la capitale économique du Pakistan, la bourse a plongé, les investisseurs redoutant la frappe indienne, rapporte la presse locale.
En soirée, le premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif a accusé l’Inde de «provocations» et de «viser l’escalade» au cours d’une conversation téléphonique avec le secrétaire d’État américain Marco Rubio, a rapporté son bureau.
«Envie d’escalade guerrière»
Plus tôt, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a appelé Shehbaz Sharif ainsi que le ministre indien des Affaires étrangères Subrahmanyam Jaishankar pour les appeler à «éviter» la confrontation et ses «conséquences tragiques».
L’attaque à Pahalgam «semble avoir donné au gouvernement de Modi le prétexte qu’il attendait pour répondre à son envie d’escalade guerrière», commente mercredi Dawn, titre pakistanais de référence en anglais.
«Même une frappe limitée de l’Inde pourrait mener à une déflagration plus large», prévient le quotidien, plaidant pour «une approche plus rationnelle, sans céder à la provocation, et une prise de recul».
En 2019 déjà, après une attaque meurtrière contre ses soldats, l’Inde avait mené un raid aérien au Pakistan douze jours plus tard et Islamabad avait riposté.
Les hostilités avaient rapidement cessé, notamment grâce à une médiation diplomatique américaine.
La Chine, grand acteur régional, a de nouveau appelé ses deux voisins à «la retenue» pour «maintenir la paix et la stabilité régionales», alors que Ryad dit être en contact avec ses deux alliés pour éviter une escalade.
Au Cachemire contrôlé par l’Inde, et depuis les minutes qui ont suivi l’attentat, les forces de sécurité poursuivent leur gigantesque traque pour retrouver les auteurs de l’attentat et leurs complices.
Dans la région à majorité musulmane, elles multiplient arrestations et interrogatoires, déjà 2000 personnes ont été interpellées, et ont détruit neuf maisons liées aux suspects présumés de l’attaque et à leurs complices.
La police indienne a diffusé le portrait-robot de trois d’entre eux, dont deux Pakistanais.
Elle les accuse de faire partie d’un groupe proche du «LeT», le mouvement extrémiste «Lashkar-e-Taiba» basé au Pakistan, déjà soupçonné des attaques qui avaient fait 166 morts à Bombay en 2008.